Chronique
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Depuis ses albums parus chez Fluide Glacial jusqu’au « Rapport de Brodeck » Manu Larcenet a fait un grand pas dans l’expérimentation graphique, développant un style en N&B unique, révélateur de sa personnalité mais aussi de son talent à mettre en images des émotions. De plus, Dargaud lui fait confiance en ajoutant une valeur supplémentaire dans la conception de ce livre ! Papier épais de qualité, noir impeccable, format à l’italienne glissé dans un fourreau ! On y voit presque l’évocation de la collection Futuropolis / Gallimard aux premiers abords avec ce qui se fait de mieux en tirage limité chez les éditeurs indépendants ! On tient là un magnifique objet…
Adaptation du roman de Philippe Claudel, « Le Rapport de Brodeck » a reçu plusieurs prix et se propose aujourd’hui dans une adaptation BD réalisée par Larcenet qui atteint des sommets de narration graphique !
Il faut dire que l’histoire n’est pas toute simple, même si en lisant le synopsis on se demande où l’auteur va nous mener. C’est bien simple, « Le Rapport de Brodeck » est une avancée cauchemardesque dans un décorum cauchemardesque, où son récit commandé par les villageois va rapidement se transformer en souvenirs pénibles, en une croisade intérieure qui va se jouer sur deux tableaux et nous montrer que parfois la réalité et la cruauté est toute autre. Les évènements se place petit à petit. Au fil des pages le récit prend de l’ampleur. Les personnages secondaires deviennent plus mystérieux et le mort encore plus énigmatique. Quant à Brodeck lui-même, son rôle reste à définir tout en se demandant quel sera son rôle et son parti pris ? Autant d’idées qu’il nous tarde de découvrir sur le dernier tome à paraître
Bien sûr, pour une partie des lecteurs, le dessin de Larcenet repose beaucoup sur son N&B, espérant y retrouver la moiteur d’un « Blast » ! Mais cette fois si, l’auteur est allé encore plus loin dans ses cases muettes, ses cases transitoires et ce coup de plume enragé qui arrive avec violence à dessiner une ambiance à la fois lourde et malsaine. Ce qui nous permet d’entrer plus facilement dans le récit pour s’imprégner de l’intrigue.
Avec ces quelques 160 pages qui se lisent assez rapidement, « Le Rapport de Brodeck » s’inscrit déjà comme un classique à ranger aux côté de « Blast ». On attend maintenant le dernier tome pour prolonger l'expérience. |